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La formation professionnelle n’est pas l’endroit pour essayer, pour se raccrocher, pour faire du temps ou pour s’occuper les mains. Merci, j’ai déjà donné. Les bons penseurs estiment que tout est dans tout et que tout est possible si on veut assez fort. J’ai des dizaines d’exemples de gens qui veulent bien, mais ne peuvent pas. On ne peut vouloir plus que l’on peut. Le tout est d’être conscient de son potentiel, il faut sortir des messages publicitaires et de la langue de bois. La formation professionnelle n’est pas un magasin de bonbons ou l’on choisit uniquement selon son goût. Les préalables, les aptitudes, les qualités, les affinités, les efforts, l’échéancier, les conditions sont des éléments qui nous amènent à faire des choix. Tout ne nous est pas accessible et cette inaccessibilité n’a rien à voir avec l’intelligence ou des limitations, c’est simplement la vie. Je n’ai pas un besoin de faire un deuil du fait que je n’ai pas fait architecture ou astrophysique. Il y a des drames plus grands que de limiter les choix d’un élève par rapport à un métier, c’est de voir une partie de la classe, qui avait choisi ce métier et qui répondait aux exigences, se démotiver parce qu’une autre partie avait été placée pour d’autres raisons que la passion et le goût de devenir un professionnel compétent. Il y a des personnes qui ne cherchent pas à résoudre leur problème. Ils se servent de ces problèmes pour justifier leur état, leur comportement ou leur inaction.

J’ai eu un cas d’un élève qui est arrivé un matin à son établi dans un grand état d’agitation. Comme tous les autres élèves, il avait son travail à faire et ce matin-là il devait prendre ses panneaux, qu’ils avaient collés la veille, pour les sabler. Il est allé chercher ses panneaux et les a ramenés à son poste de travail. Malheureusement, l’un de ses panneaux avait une fissure qu’il n’avait pas repérée la veille. Au moment de les enlever des serres, il a éclaté. Cela l’a rendu furieux.

J’étais à mon bureau pour préparer mes fiches d’évaluation avant d’aller juger de l’état d’avancement et de la conformité des travaux. Il tire les morceaux de son panneau dans l’atelier et se dirige vers mon bureau avec un morceau de madrier. Il ferme la porte derrière lui, il me regarde et me dis  » c’est à matin que tu meures mon tab…. ». J’étais assis et il était au-dessus de moi.

J’avais un ami avocat qui m’avait indiqué que si le visage de celui qui te menace est rouge c’est que son sang est dans sa tête,t il réfléchi. Dans ce cas, il ne te frappera pas. Si son visage est blanc, cela veut dire que son sang est dans ses muscles, il est plus que probable qu’il passe à l’acte.

Dans l’action, j’avais de la difficulté à me rendre compte si le visage était blanc ou rouge. Si son visage était rose est-ce que cela voulait dire qu’il pouvait réfléchir et passer à l’acte ? Au moment où cela arrive, de toute façon on n’a pas le temps de penser à cela. On pense à survivre.

Je ne lui ai pas parlé sur le moment. Il m’a regardé et il m’a dit que si je le dénonçais au directeur, qu’il me tuerait. Il me regarde et il me dit de lui parler sinon il allait me tuer. Je n’avais pas beaucoup de portes de sortie. Je lui ai demandé comment il allait. Il m’a dit, ou plutôt il m’a crié qu’il avait eu des problèmes avec sa blonde la veille au soir et qu’elle l’avait mis à la porte. Il avait été au bar prendre un verre et d’autres substances et qu’en revenant il avait eu des problèmes avec son auto. De plus, son chèque d’aide social avait également été coupé. En arrivant en classe le matin quand il a vu son panneau craqué il a vu rouge et tout cela c’était de ma faute. Je pense plutôt que j’étais la personne la plus proche sur laquelle il pouvait décharger sa frustration.

À suivre … « Respirez par le nez»