Le 5 et 6 février dernier, le ministre de l’Éducation du Québec a convoqué plus de 300 personnes pour parler de la formation professionnelle du 21e siècle. Je dis bien parler, car les participants étaient tellement disparates et connaissaient tellement peu la formation professionnelle que finalement cela n’a été que du « partage » superficiel des problèmes d’organisation de la formation professionnelle. Ce qui est sous-entendu des discussions, c’est que la formation professionnelle c’est dispendieux à maintenir et compliquée à organiser. La solution c’est de faire sortir les élèves des centres, de les diplômer en plus grand nombre plus rapidement et à moindre coût pour répondre aux besoins en main-d’oeuvre.
Pourtant, s’il y a une donnée probante, mot à la mode, sur laquelle on peut se fier c’est que fondamentalement la relation d’un enseignant avec un apprenant est déterminante pour les apprentissages. Malheureusement, lors de la consultation, le rôle de l’enseignant a été complètement évacué. Jamais il n’en a été question. Les conditions de travail, les conditions de formation, les ressources disponibles, le support aux enseignants, les services complémentaires, n’ont pas fait l’objet de discussion.
Ce qui était important c’était de se préoccuper des technologies de l’information, de la formation à distance, de la formation à temps partiel, de la formation en entreprise, des besoins en main-d’oeuvre, du financement et surtout des compétences du 21e siècle. Comment se préoccuper des compétences du 21e siècle quand celles du 20e siècle n’ont pas encore été développées ? Comment considérer ces compétences avec des reconnaissances axées sur l’augmentation des diplômés et les besoins pointus des régions au détriment du développement des élèves ?
Il ne faut pas faire sortir les élèves plus rapidement, il faut les former complètement. Le défi, comme l’indiquait le conseil supérieur de l’éducation, c’est de tirer les élèves vers le haut et non la formation vers le bas. Ce n’est pas d’adapter la formation et les diplômes à nos pauvres élèves qui ont tant de difficulté dans notre système d’éducation, mais de faire preuve d’imagination et de trouver de nouvelles conditions et pratiques pour amener tous les apprenants à apprendre ce qui lui sera nécessaire pour être un élément dynamique de notre société. Si l’on développe les vraies compétences de nos apprenants, ils seront en mesure de faire face au défi du 21e siècle.
- Les changements à la nature des emplois requièrent des qualités personnelles et des compétences professionnelles de plus en plus définies et complexes : le travail est plus abstrait et fait appel à des activités de type cognitif (réflexion, choix, décisions). (Conseil supérieur de l’éducation, 2012)
- Il faut donc trouver des manières d’adapter l’enseignement pour rejoindre ces élèves qui ont des façons d’apprendre différentes, plus pratiques et concrètes. Ce défi interpelle particulièrement le personnel enseignant et sa capacité à différencier l’enseignement et les approches pédagogiques. (Conseil supérieur de l’éducation, 2012)
Vous avez dû comprendre que j’ai été très déçu de cette consultation. Je viens de comprendre la pertinence de la retraite, c’est d’éviter de devoir tout recommencer. Si l’on veut valoriser la formation professionnelle, il faut arrêter de la dévaloriser et de demander l’avis de n’importe qui. Il faut avoir une vision orientée vers ceux qui apprennent et ceux qui font apprendre. Un centre de formation professionnelle n’a pas pour objectif de faire de l’argent, de donner des diplômes et des attestations, de gérer des conventions collectives, mais de faire apprendre une profession à une personne pour qu’elle puisse offrir sa force de travail et son imagination à la société et qu’elle puisse s’épanouir. Tout ce qui gravite autour est au service de cet objectif.
Ce ne sont pas les programmes ou la relation avec les entreprises qui font que les élèves apprennent une profession, c’est la relation entre un enseignant compétent en enseignement et un élève qui a le goût de pratiquer la profession qu’il a choisie. Pour que cela puisse se faire il faut développer les compétences du 21e siècle de nos enseignants, avant celles des apprenants, il faut donner le goût de la formation professionnelle à ceux qui auront a en bénéficier. C’est la qualité qui est attrayante, pas la rapidité.
Ce n’était malheureusement pas le sujet de la consultation du ministre.
De toute façon, c’est juste de la formation professionnelle. Ça intéresse qui?
Jan 20, 2019 @ 17:51:30
En tant que nouvelles enseignante, je trouve vos propos bien réels et très inspirants, malgré leur note un peu triste… Cela m’inspire et me donne envie de poursuivre dans la voie de l’instruction des savoirs fondamentales auprès de notre relève; nos apprenants. Je constate que parfois on tourne les coins ronds à trop vouloir accélérer ou accepter qu’ils ne soient pas toujours à la hauteur des critères pourtant bien établis… on insiste trop souvent sur le fait que l’important c’est de les diplômer! Pour ma part, je ne veux pas être associée à une diminution de la qualité de ma profession, alors je maintien le cap et je focus sur cette relation positive avec chaque élève dans le but d’aller chercher en eux ce désir d’être à la hauteur qui dors trop souvent en 2019…
J’aimeJ’aime
Sep 17, 2018 @ 17:14:41
Merci pour ce texte, il est très intéressant et j’ai appris beaucoup de chose. Je comprend votre déception face aux mauvaises préoccupations de de certaines personnes dans le domaine de la formation professionnel. Je vous félicite de tenir votre bout. Il faut que les priorités sont comprises dans le domaine de la formation professionnel et qu’un vent de changement se fasse afin que la qualité de la formation soit davantage prise en compte. Merci
Josée
J’aimeJ’aime
Fév 15, 2018 @ 21:52:34
Bonjour Henri,
À la lecture de ton propos je comprends que tu sois déçu de cette rencontre de consultation, car il semble que l’ensemble des participants montrait peu de connaissance de ce que l’enseignement actuel et futur devrait être pour supporter une formation professionnelle se voulant de plus en plus complexe.
Cette complexité est exigée par le développement technologique rapide particulièrement au Québec et c’est par une formation de plus en plus poussée des enseignants et enseignantes que cette dernière suivra le rythme imposé.
Malgré cet événement décourageant, après plusieurs autres dans le passé, l’importance et le désintéressement attribués à la FP par plusieurs intervenants en éducation depuis plusieurs années est un élément qui contribue, lentement toutefois, à une meilleure compréhension de ce secteur de l’enseignement et de sa grande importance pour notre société.
Je crois que tous les enseignants(tes) ont besoin d’aide pour développer leur enseignement, particulièrement ceux de la FP, considérant leur provenance de l’industrie. De même, les intervenants en éducation ont besoin d’aide pour objectiver leurs projets d’aide à l’enseignement.
L’important, c’est de poursuivre avec nos valeurs et nos croyances en éducation.
Bonne continuation et salutations
Robert P. Renaud
J’aimeJ’aime
Mar 20, 2018 @ 09:48:19
Merci pour l’encouragement! On continue malgré tout.
J’aimeJ’aime
Fév 14, 2018 @ 13:07:58
Beau « coup de gueule » comme on dit chez nous en France 😀
travaillant dans un CFA centre de formation pour apprenti nous vivons la grande Réforme de l apprentissage à la sauce Macron et la bataille entre les régions et les branches professionnelles et les cra intes de l éducation Nationale
Merci pour articles et autres documents
en Portes ouvertes ce samedi bon nombre de documents sur les savoir être et les compétences professionnelles en affichage dans nos locaux , entre couloirs et salle de cours
À quand une tournée de conférences en France ? Bientôt j espère avec un petit tour dans l ouest et dans le 53
Toujours un grand plaisir de vous lire
J’aimeJ’aime
Fév 14, 2018 @ 12:44:03
Bonjour Henri
Que vous dire qu’il ne faut pas perdre votre conviction ! concernant la possibilité de donner envie d’enseigner aux formateurs et d’apprendre aux apprenants et de restaurer ce lien si fragile , le problème que vous évoquez c’est que cette réunion étaient faites par les prescripteurs de formations clés en main et non pas pour proposer des outils pédagogique pour faire lien entre les formateurs et les apprenants , mais surtout ne nous abandonnez pas et continuez à nous partager des outils qui au minima confirment ma façon d’accompagner, les personnes en difficulté, vers la formation. Une formation qui leur permet de retrouver une identité sociale et surtout une capacité à réfléchir en action , j’ai 52 ans je me suis formée tout au long de ma vie et je continue encore parce que j’ai pu à toutes mes étapes de ma vie rencontrer des personnes ressources qui ont continué à me donner envie de partager ce que je connaissais et apprendre ce que je voulais connaître , vous faites partie de ces personnes ressources
merci d’être là .
Patricia BEZARD ROBIN
J’aimeJ’aime