Le choix d’une approche de formation orientée vers l’enseignement individualisé est rarement basé à partir de paramètres pédagogiques. C’est à tout le moins ce que j’ai pu observer à maintes reprises dans des milieux de formation professionnelle. Le choix de cette modalité de formation est le plus souvent suscité par des impératifs organisationnels et financiers.   J’aimerais apporter un nouvel éclairage sur l’enseignement individualisé à partir d’un référentiel pédagogique. L’idée n’est pas d’être pour ou contre cette modalité de formation, mais d’être en mesure de la choisir à partir d’un référentiel cohérent avec le but d’une formation, c’est-à-dire faire changer une personne.

J’aborderai donc ce premier article en présentant cinq éléments de références qui établissent le fondement de ma représentation de ce dispositif de formation.

Premièrement, avant toute chose il faut être en mesure d’établir clairement les objets, le but, les attentes, les intentions et les objectifs de la formation. Tous ces éléments se retrouvent dans un document que l’on appelle un programme de formation.

Deuxièmement, il faut considérer la personne en apprentissage avec ses caractéristiques, ses objectifs, ses contraintes, son capital de motivation et ses aspirations.

Troisièmement, l’enseignant aura à jouer un rôle crucial dans la dynamique du processus d’apprentissage. Contrairement aux croyances que l’enseignement individualisé développe l’autonomie de la personne en apprentissage, elle permet tout simplement à la personne déjà autonome de s’approprier l’objet d’apprentissage souvent au détriment du but, des attentes et des intentions du programme. Il ne faut pas considérer l’apprentissage comme une simple acquisition de connaissances ou d’habiletés. Le développement de compétences professionnelles est beaucoup plus large que la simple mémorisation d’informations ou réalisation de tâches. L’enseignant se doit de jouer un rôle d’accompagnateur de la personne en apprentissage pour l’aider à développer sa compétence en lui faisant comprendre et réussir les activités professionnelles à l’intérieur de situations professionnelles. Le rôle de l’enseignant passe de pourvoyeur d’informations à accompagnateur de l’apprenant pour le supporter dans l’appropriation des savoirs nécessaires au développement de sa compétence.

Quatrièmement, les ressources qui seront mises à la disposition de l’apprenant dans le but de favoriser ses apprentissages. Cet élément est souvent considéré de manière accessoire ou simpliste dans la mise en place d’un dispositif d’enseignement individualisé. Si nous abordons l’apprentissage comme une simple acquisition de connaissances ou d’habiletés, le cahier d’apprentissage ou d’exercice est désigné généralement l’instrument de prédilection de cette modalité de formation. Le développement des compétences exige non seulement l’appropriation des savoirs nécessaires ainsi que des habiletés, mais également une confrontation aux situations de travail où ces savoirs prennent tous leurs sens. Ces ressources peuvent se décliner sous trois formes, les ressources didactiques pour aider à l’apprentissage, les ressources matérielles pour réaliser les tâches et les ressources cognitives pour accéder au savoir.

Cinquièmement, l’environnement d’apprentissage deviendra un élément clé de la possibilité de la personne en apprentissage à manifester les comportements professionnels associés au développement de la compétence professionnelle. Cet environnement doit permettre à la personne en apprentissage de se confronter, dans un milieu agencé dans ce sens, à une réalité virtuelle ou simulée des situations de travail qu’elle aura à affronter dans la réalité. Cet environnement devra favoriser une approche réflexive basée sur des expériences où le savoir, le savoir-faire et le savoir-être sont assemblés dans une réalité très proche du monde du travail.

La prochaine fois, nous verrons en quoi cette modalité de formation est compatible ou incompatible avec certains apprentissages et quelles seraient les mesures d’atténuation qu’il faudrait considérer pour, non pas justifier cette modalité de formation mais plutôt, favoriser le but même de la formation, c’est-à-dire le développement de la compétence professionnelle.

À suivre …