Je travaille depuis quinze ans à essayer de saisir le savoir-être comme objet d’apprentissage. La tâche n’est pas simple. Les représentations que les gens ont du savoir-être sont très variées. Pour certains, ce sont des valeurs, des principes ou des règles pour d’autres ce sont des qualités, des aptitudes ou des comportements.

Plusieurs confondent le savoir-être professionnel avec le savoir-être personnel. Il peut y avoir confusion entre éduquer une personne et l’instruire. Le savoir-être vu comme un objet d’apprentissage dans un programme de formation professionnelle ou technique doit être analysé sous l’angle professionnel et non à partir de l’angle personnel. C’est le savoir-être professionnel auquel l’apprenant doit adhérer et qu’il doit apprendre. Ce n’est que par la suite que le transfert se fera aux comportements personnels de l’individu. Contrairement aux pratiques d’encadrement généralement orientées vers le savoir-être personnel, qui s’adresse surtout aux comportements généraux et aux activités de formation dans un établissement,  il s’agit ici de prendre un détour pour changer les comportements personnels par le chemin du comportement professionnel et ainsi adopter une approche formative plutôt que répressive.

Le savoir-être n’est pas qu’une connaissance, c’est un état. Un savoir-être peut être considéré comme transversal, même si le terme en fait sursauter plusieurs. Lorsque le savoir-être est appris et intégré il se transfère et contamine, positivement, les comportements où il doit se manifester, qu’ils soient professionnels ou personnels. Code de vie et code de savoir-être n’ont pas le même sens et la même utilité dans l’apprentissage d’un métier ou d’une profession.

Le code de vie d’un milieu de formation a pour fonction de faire cohabiter un certain nombre de personnes ensemble. Cet instrument est surtout basé sur ce que l’on peut appeler le civisme, la courtoisie et la bienséance. Dans un milieu de formation le code de vie, comme le code de la sécurité routière, doit être respecté pour le bien de la collectivité.

Il en va tout autrement avec ce que j’appelle le code de savoir-être. Ce dernier est composé des éléments qui caractérisent l’identité professionnelle en traçant une ligne de conduite à laquelle l’apprenant devra adhérer et qu’il devra manifester durant ses apprentissages, permettant ainsi, aux formateurs comme à lui-même, d’observer le développement de sa compétence professionnelle. Cette ligne de conduite professionnelle devient alors un objet d’apprentissage que nous devons expliciter, formaliser et contextualiser pour en favoriser l’apprentissage et la manifestation.

Le savoir-être professionnel, de par sa dénomination, nous indique trois termes qu’il faut bien comprendre pour pouvoir le transformer en un véritable objet d’apprentissage. Le concept de «savoir» nous réfère à un ensemble de connaissances organisé. Le concept de «être»  indique ce qui caractérise l’existence d’une personne ou d’un individu. Nous pouvons donner un sens à «savoir-être» comme étant un ensemble organisé de connaissances qui caractérise un individu. Le concept de professionnel a le sens d’un type d’occupation rémunérée qu’il occupera.

Le savoir-être professionnel est ici interprété comme étant un ensemble organisé de connaissances qui permet à un individu d’être reconnu dans ses actions et ses tâches comme compétent dans sa profession. Le schéma que je présente au début de l’article représente les différentes composantes du savoir-être professionnel à tenir compte lors de l’explicitation, de la formalisation et de la contextualisation de l’objet d’apprentissage. Cette liste n’est pas exhaustive, mais explicite des connaissances qu’il faudrait que l’apprenant apprenne pour être en mesure de percevoir, adhérer, s’approprier et manifester les comportements professionnels désirés.

Lorsque l’objet est bien défini, la didactique peut ensuite jouer son rôle !