Le transfert des apprentissages constitue l’aboutissement du développement de la compétence professionnelle. Souvent, les enseignants me questionnent sur le pourquoi du manque de transfert, chez les élèves, de la théorie dans la pratique. D’autres m’indiquent le manque de transfert des apprentissages, chez les élèves, entre le centre de formation et le milieu de stage. À partir de ces questionnements, nous sommes en droit de nous questionner sur le transfert réel des apprentissages des élèves entre la formation qu’ils ont reçue et l’entreprise où ils vont travailler. Jean-François Russel (2011), dans son livre, «Gérer la formation, viser le transfert», indique des statistiques et des constats qui sont révélateurs sur cet aboutissement de la formation.

  • 60 à 90 %  des apprentissages réalisés en formation ne sont pas transférés en milieu de travail. Sacks et Haccoun (2004)
  • 62% peuvent appliquer les apprentissages immédiatement après leur retour au travail, 44% après 6 mois, 34% après une année. Sacks et Belcourt (1997)
  • 10% des formations dispensées au sein des entreprises peuvent avoir un impact sur le transfert des apprentissages en milieu de travail. Naquin et Baldwin (2003)
  • Il semble donc que les organisations parviennent difficilement à dépasser la barre des 10% à 20% d’apprentissages qui font l’objet d’un transfert à long terme en milieu de travail. Holton (2003)

Le défi est donc, pour compléter le développement de la compétence professionnelle, de favoriser le processus de transfert entre le milieu de formation et le milieu organisationnel.

On peut, sans trop se tromper, affirmer que la manifestation d’une compétence professionnelle consiste dans la capacité d’une personne à s’adapter à de nouvelles situations de travail et d’atteindre le niveau de performance désiré de façon autonome. Mais comment faire cela dans un milieu de formation?

Le schéma que je vous présente est un essai de ma part de représenter les idées de Russel sur le sujet. Il se préoccupe, et à raison, de la transférabilité des formations. Il indique qu’il y a trois facteurs pour développer ce processus. Premier facteur, les pratiques pédagogiques axées sur la découverte, la résolution de problèmes et l’autorégulation de l’apprenant. Le deuxième facteur, l’environnement de formation qui est soit identique à l’environnement réel, si l’on vise que la performance, ou qui doit être différent, si l’on vise le développement de la compétence à l’adaptation. Le troisième facteur, tenir compte des caractéristiques des apprenants. C’est-à-dire, de tenir compte des mécanismes différents de chaque apprenant en ce qui concerne le volet cognitif, émotif et d’action.

La manifestation du développement d’une expertise adaptative, donc de transfert, chez nos apprenants se fait par des comportements métacognitifs de décontextualisation et de recontextualisation de situation de travail ou se dérouleront les tâches de travail et où les pratiques de travail devront être adaptées. On évalue l’expertise d’adaptation par la réflexivité sur le processus (compréhension) et la performance par la rétroaction sur le résultat (réussite).

La formation, toujours selon Russel, doit viser soit de nouveaux apprentissages, l’accroissement de la performance ou le développement d’une expertise adaptative. Dans ces trois cas, le but de la formation vise l’amélioration de la performance, la mise à jour des compétences ou le développement des compétences de base. Le transfert demande également que l’apprenant adhère à la formation. Pour ce faire, il faut que la formation réponde aux besoins des apprenants en ce qui a trait à l’amélioration de leur performance. Il faut que la compétence visée soit crédible aux yeux de l’apprenant. Il faut que l’apprenant puisse croire qu’il va s’améliorer. Finalement, l’apprenant doit constater le caractère applicable des apprentissages.

Le transfert constitue vraiment le défi à relever pour pouvoir vraiment compléter le processus de l’approche par compétences et répondre aux besoins des apprenants, c’est-à-dire intégrer le marché du travail de façon durable.