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On associe souvent le danger aux machines qui font du bruit. Plus c’est gros et bruyant, plus c’est dangereux. La machine est dangereuse et peut blesser. Cela est vrai, mais dans de très rares cas. Le danger vient surtout du fait de nos actions, de notre négligence, de notre ignorance et de ceux des autres dans un environnement.

Je me souviens de trois accidents qui ont eu lieu dans mes cours. Le premier fut dramatique, le second fut stupide et le troisième presque drôle. Ils ne se sont pas tous déroulés la première année, mais durant mes années d’enseignement en ébénisterie.

Le premier accident fut effectivement au début de ma première année. L’un de mes étudiants s’est coupé un pouce en utilisant une dégauchisseuse. Cela ne vous dit probablement pas grand-chose, mais je vous dirai seulement qu’il a été chanceux dans sa malchance. Ce type de machine aurait pu facilement lui déchiqueter la main et le bras.

Au moment où cela arrive, comme prof, vous vous sentez responsable de ce qui est arrivé. Mais il y a un monde entre se sentir responsable de qui est arrivé et être visé comme le responsable de l’accident. Dans le premier cas vous vous demandez ce que vous auriez pu faire ou dire qui aurait fait en sorte qu’un tel événement aurait pu être évité. Dans l’autre cas vous êtes coupable et condamné d’avoir fait en sorte que cet accident arrive.

Sur le moment de l’accident tout le monde est peiné et sous le choc. Mon étudiant m’avait avoué qu’il avait pris un risque et que cet événement malheureux était arrivé par sa faute. Les faits allaient dans ce sens. Il était entré dans l’atelier sans permission, sur l’heure du midi. Il avait pris une pièce de bois trop courte et trop large pour ce type de machine. Il avait ajusté la machine pour une coupe trop épaisse. Il a mis en marche la machine, présenté la pièce de bois sur les couteaux et ce qui devait arriver, arriva. La pièce de bois a été projetée par l’arrière et la main à continuer dans les couteaux. Heureusement, il n’y a eu que le pouce qui a été coupé. Une personne passant par là a entendu le cri de l’élève et a intervenue immédiatement. L’analyse de la situation c’est que l’élève n’avait pas respecté les règlements, il avait pris un risque en ne respectant pas les procédures de travail et s’était blessé. Le dossier semblait clos, mais c’était loin d’être terminé.

Un mois plus tard, j’ai reçu une mise en demeure qui indiquait que j’étais responsable de cet accident et je faisais l’objet d’une poursuite pour négligence. Vous me direz que cela n’est pas grave, j’étais un prof donc c’était à la commission scolaire d’assumer cette responsabilité. Lors de mes cinq premières années d’enseignement, je travaillais au salaire horaire. Je n’avais pas de contrat à temps plein. Il n’existait pas de contrat à temps plein et de permanence pour un enseignant à l’éducation aux adultes et encore moins en formation professionnelle. Je suis devenu le premier enseignant, à l’éducation aux adultes, permanent de ma commission scolaire lorsque le ministère de l’éducation a permis ce type de contrat. Jusqu’à ce moment, je pouvais être accusé conjointement, avec la commission scolaire, si j’avais fait preuve de négligence dans mon enseignement.

La poursuite était de 35 000$ et mettait en péril la suite de ma carrière, comme professeur, si la commission scolaire constatait que j’avais fait preuve de négligence.

À suivre : 3. Responsable de quoi?