L’une des particularités de la formation professionnelle est la gestion de la dangerosité de certains outils, de certaines tâches, de certains événements ou certaines situations. Pastré (2011) indique qu’il existe trois caractéristiques pour illustrer une activité professionnelle. La première caractéristique vise les activités qui impliquent l’utilisation de machines, d’outils ou de divers instruments. C’est la machine qui fait le travail, le rôle de la personne est de servir cette machine. Le travail sur les chaînes de montage ou dans une manufacture regroupait ce type d’activité. La deuxième caractéristique touche les activités où c’est la personne et sa façon de faire qui domine. Le geste du professionnel a un rôle déterminant. Le carrossier, l’ébéniste, le cuisinier ou le soudeur en sont de bons exemples. La troisième caractéristique touche les interactions humaines, c’est la capacité d’entrer en relation avec d’autres personnes qui domine.Les domaines de la santé, de la vente, des services ou des communications en sont de bons exemples également.
Certains métiers peuvent comporter une seule de ces caractéristiques, et d’autres pouvant être un assemblage de deux ou trois. Plus il y a de caractéristiques, plus la fonction est complexe. En ébénisterie, les trois caractéristiques sont présentes. Certaines machines ne demandaient qu’à être alimentées, des activités exigeaient la dextérité de l’artisan et même de l’artiste, d’autres mettaient en évidence les capacités de vendeur, de service à la clientèle et de gestionnaire.
À l’époque, je n’étais pas en mesure de faire ces nuances. Pour moi l’ébénisterie c’était du bois, des machines, des outils, des assemblages, du sablage, de la finition et des livraisons. Au moment où je devais utiliser des machines et des outils, il fallait tout simplement faire attention pour ne pas se blesser.
Je ne comprenais pas que pour une personne novice il n’est pas possible d’anticiper les conséquences de ses actes quand elle n’est pas en mesure de comprendre ce qu’elle fait, le contexte où elle agit et la situation dans laquelle elle oeuvre. C’est ce qui arrive lorsque l’on forme des personnes à faire des tâches plutôt que de les amener à comprendre le travail à faire et la situation où elle se déroule. On ne peut pas comprendre l’architecture d’une maison en ne regardant que ses briques. On ne peut comprendre l’histoire écrite dans un livre en analysant le papier et l’encre avec laquelle elle est réalisée. Il faut prendre de la distance, faire des liens, analyser, s’éloigner du mûr pour regarder l’ensemble et ainsi être en mesure d’avoir un aperçu global.
Dans un atelier d’ébénisterie, il y a des machines, des établis, des outils, des grandes pièces de bois, des espaces de déplacements, d’autres personnes qui réalisent leur travail, de la poussière de bois, des pièces de bois, des rallonges électriques, des coffres d’outils, etc. Ce n’est pas de prendre en compte chacun de ces éléments qui est complexe, mais le fait qu’ils soient ensemble et en relation les uns avec les autres. Je parle ici d’ébénisterie, mais vous pouvez extrapoler cet exemple à tous les métiers. Les événements peuvent faire l’objet de prévision, les conséquences peuvent être déterminées, mais il est impossible de dire quand ils se produiront, ce qui fait que le moment est indéterminable. D’où l’obligation de développer le jugement des élèves pour éviter qu’ils se blessent.
Un classeur en secrétariat nous semble anodin. Il devient un élément de danger lorsque l’un de ses tiroirs est ouvert. Il n’y a pas de danger lors de la consultation de documents par la secrétaire. Il y a danger lorsqu’il est oublié ouvert et lorsqu’il y a d’autres personnes qui circulent. Je vous laisse imaginer toutes les situations qui peuvent arriver. Cela est vrai pour plusieurs objets dans un simple bureau. Pourtant il n’y a pas de formation en santé et sécurité dans le programme en secrétariat et en bureautique.
À suivre : 2. C’est de votre faute!
Juil 08, 2014 @ 04:21:00
bonjour,
je suis éducateur technique spécialisé cuisine dans un Institut médico éducative. Je viens d’obtenir mon diplôme d’ETS et le sujet de mon mémoire tourné autour de l’utilisation des machines et l’acquisition d’une certaine autonomie dans le travail grâce aux machines.
Mais leur utilisation est compromise du faite d’un article de lois interdisant leur utilisation avant 18 ans.
Comment puis je continuer dans les apprentissages de techniques lorsque l’on sait la place que prends les machines outils aujourd’hui?
Merci pour vos travaux mais il existe des professionnelles qui transmettent des savoirs à du publics en situation de handicap et il serait intéressant que vos nous aidiez dans la recherche de moyens pour parvenir à adapter notre technique.
Merci
Cordialement
M.ZAJAC
Éducateur Technique Spécialisé
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Juil 11, 2014 @ 11:21:17
Je comprends votre problématique. Ma première préoccupation est le développement de la compétence professionnelle. La compétence est plus orientée vers la situation de travail, la tâche à réaliser et les pratiques à adapter selon les circonstances. La machine et les outils ont un rôle secondaire. Elles sont au service de la pratique de travail et non l’objet d’apprentissage final.
Dans votre contexte, je comprends que vous essayez de faire apprendre des métiers semi-spécialisés pour faciliter l’intégration au travail de personne ayant des limitations. Il est naturel que dans ce contexte l’utilisation de machines ou d’instruments devienne un premier obstacle à franchir. Même si c’est un obstacle important il ne doit pas occulter la tâche comme telle. La tâche est plus grande que l’outil. Elle est conditionnée par le but du travail, la situation de travail, les circonstances et les événements qui s’y déroulent.
Vous pourriez commencer à penser à utiliser la simulation en attendant d’utiliser de façon réelle les appareillages. La simulation, avec certains logiciels, permet d’aller plus loin et de se concentrer sur la tâche plutôt que sur la machine.
C’est une idée.
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Juil 16, 2014 @ 04:22:37
Bonjour,
je comprend que votre compétence s’oriente vers le monde professionnel ordinaire. Mais le monde des adultes en situation de handicap, et notamment la déficience intellectuelle, a lui aussi axé à des formations professionnelles. Comment peut on adapter nos pratiques afin de les rendre accessibles à ce public?
Dans la seconde partie, vous me parlez de simulation et qu’il existe des logiciels. Où puis je les trouver?
Le métier d’Éducateur Technique Spécialisé a pour but d’utiliser la technique comme support afin d’accompagner des usagers souffrant de déficiences intellectuel légère et moyenne ainsi que de TSA (trouble du spectre autistique) dans des apprentissages de métiers.Pour ma part mon métier de base est celui de pâtissier cuisinier, J’adapte mes référentielles afin de les rendre accessible aux usagers,mais j’ai besoin d’outils afin de pouvoir les mettre en application.J’ai des collègues dont les métiers premiers peuvent être aussi bien : l’horticulture,les métiers du bâtiments ,la menuiserie et qui sont confrontés aux mêmes problématiques que moi.
Comment travail nos collègues canadiens? Ont ils des outils pédagogiques adapté au monde de la déficience?
Je vous pose toutes ces questions car en France,nous devons inventé nos propres outils pédagogiques et je suis curieux de savoir ce qui se fait ailleurs.
Merci pour vos conseils et excusez moi si des fautes d’orthographes ce seraient glissées dans mon écrit.
M.ZAJAC
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