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Ceux qui mettent cette affirmation en doute affichent tout simplement leur ignorance de la réalité des situations de travail. Ils occultent cette réalité par celle artificielle du milieu scolaire. J’ai eu à maintes reprises à faire face à des absurdités qu’on put provoquer cette expression de «qui veut, peut!».

J’ai eu à accompagner un enseignant qui avait à gérer un élève aveugle dans un cours de barman. J’ai eu à gérer un élève ayant de la dystrophie musculaire dans mon cours d’ébénisterie. J’ai eu à aider un enseignant à gérer un élève daltonien et un autre allergique au froid, dans un cours de forage et dynamitage. Si les responsables des centres de formation avaient la bonne idée de fournir le mode d’emploi associé à l’incapacité des élèves qui veulent, mais qui ne peuvent pas, cela pourrait aider l’enseignant plutôt que de lui donner simplement le problème en se fermant les yeux.

Je ne suis pas de ceux qui pensent que pour être un bon prof il faut que tu vives toute la misère que les autres ont eue. Au contraire, j’ai consacré une grande partie de ma carrière à fournir aux enseignants de la formation professionnelle des outils, des ressources, des pratiques pour éviter de vivre ce que j’ai vécu et pour qu’ils puissent aller plus loin.

Enseigner c’est gérer, de la façon la plus efficace pour l’apprentissage, des situations incertaines. Le tout est de décider l’indicateur d’efficacité. Le but d’une formation professionnelle, en ce qui me concerne, est de faire apprendre les savoirs nécessaires aux manifestations de la compétence professionnelle selon le seuil d’entrée sur le marché du travail. L’apprenant doit savoir bien faire son travail pour être reconnu dans sa profession.

Ce qui est incertain c’est l’apprentissage des savoirs par l’élève. Pour que cela puisse se produire il n’y a rien de certain par rapport à l’aménagent de l’environnement d’apprentissage pouvant favoriser ces apprentissages. Il n’y a rien de certain sur ce que l’enseignant doit faire pour susciter les apprentissages. Il n’y a rien de certain sur la façon de rendre accessibles les savoirs à apprendre. Il n’y a rien de certain sur ce que l’élève doit faire pour réaliser les apprentissages.

Malheureusement, trop souvent, plutôt que d’assumer la gestion de ces incertitudes, nous nous imaginons des certitudes. Il faut que je leur dise pour qu’ils apprennent. Il faut qu’ils écoutent pour apprendre. Il faut faire des devoirs et étudier pour apprendre. Il faut apprendre pour réussir les examens. Il faut réussir les examens pour avoir le succès dans ses études. Il faut étudier tel livre pour savoir. Il faut mémoriser pour apprendre. La pire, il faut faire ce que je dis pour réussir.

 

À suivre : 4. Tirer sur l’élève pour qu’il pousse mieux.