Le travail en atelier est souvent la bouée de sauvetage des nouveaux enseignants. C’est l’endroit où nous pouvons montrer, de manière tangible, nos compétences. C’est beaucoup plus difficile en classe pour un prof débutant. Dans mon cas, mon atelier était loin de faire l’affaire, comme je l’ai déjà indiqué précédemment. Les équipements, à l’exception de quelques-uns, étaient absents, en mauvais état ou inadéquats. Les établis étaient faits pour du travail léger. Les dessus étaient en bois, mais les pattes en métal plié. Il serait difficile de faire du rabotage sans se promener avec l’établi.
Il n’y avait pas de salle de finition, pas d’espace d’entreposage du bois, pas d’endroit pour faire du collage, etc. Finalement, mon atelier n’avait que le nom sans la fonction.
Le travail en atelier va de pair avec le magasin où les élèves vont se procurer les outils à mains et autres pièces d’équipement ainsi que certains matériaux. Je vous ai déjà indiqué que mon école était spéciale. Le bâtiment et les équipements étaient sous la responsabilité d’un autre ministère qui n’avait pas intérêt à ce que mon cours fonctionne, car il voulait retrouver la responsabilité de la formation. Vous pouvez facilement imaginer le type de collaboration que j’ai pu avoir. Cela a pris un mois pour trouver les étaux pour chacun des établis de l’atelier. Ce n’était qu’un début. Je ne peux pas trop me plaindre de la situation, car cela a été une source incalculable d’anecdotes que je vais avoir le plaisir de vous communiquer.
Par contre, lorsque je donnais mes cours c’était loin d’être drôle d’avoir à gérer le manque d’équipement, le manque de collaboration, l’absence de matériaux, l’intolérance des élèves et les frustrations de mon directeur, sans compter les miennes. Mais à ce moment, je pensais que cela faisait partie de mon travail et que la situation devait être normale, je n’étais plus en entreprise, j’étais rendu un fonctionnaire à la leçon.
Effectivement, à l’époque il n’y avait pas de contrat à long terme et la possibilité de permanence était absente. J’étais à l’éducation aux adultes et en formation professionnelle. Les éternels oubliés des fins de liste. Nous ne faisions pas partie des premières revendications des syndicats et des préoccupations du conseil des commissaires et de la commission scolaire. Il faudra près de cinq ans avant que ma situation se stabilise. Je suis devenu le premier professeur en formation professionnelle à l’éducation des adultes à avoir un contrat à temps plein avec possibilité d’une permanence.
Je ne savais pas, à l’époque, que ces premiers cinq ans d’enseignement retarderaient ma retraite d’autant. J’ai maintenant soixante ans et je ne pourrai pas prendre ma pleine retraite avant soixante-cinq ans. Mon directeur à l’époque m’avait convaincu qu’il valait mieux avoir un bon T4 (Relevé de salaire sans les déductions pour le régime de retraite) que la sécurité d’emploi. Ce fut le prix à payer pour le manque d’expérience et la jeunesse. Ce n’est pas grave, j’aime enseigner, même encore aujourd’hui, c’est ma plus grande satisfaction.
À suivre … Partie 2 : Début difficile
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