On se préoccupe beaucoup de remplir la tête et d’occuper les mains, mais que fait-on avec le cœur ? Comment donne-t-on des repères à un apprenant sur les comportements professionnels à mettre en œuvre en même temps que sa tête et ses mains ? Mon élève avait perdu ses repères de vie et je ne lui en avais pas fourni pour fonctionner dans son métier. Je n’ai pas compris cela sur le moment, mais cela a fait l’objet d’une de mes préoccupations majeures dans mes recherches en didactique. C’est pourquoi aujourd’hui je conçois des environnements d’apprentissage ou l’on définit premièrement les savoir-être à développer et par la suite les savoirs et savoir-faire sont organisés en conséquence. Le savoir-être devient le sens des autres savoirs. Il constitue le mortier qui lie ensemble les autres apprentissages. C’est à partir des savoir-être que l’élève va se rendre compte de ses affinités avec le métier.
Il ne s’agit pas de changer l’élève dans ce qu’il est, mais de lui faire prendre conscience et de lui faire vivre ce qu’il devra devenir pour être en mesure de faire son métier.
C’est toute la subtilité entre avoir des compétences et être compétent. Je ne doute pas que nos élèves aient des compétences à la fin de leur formation. Leur diplôme atteste ce fait. Mais au témoignage de nombreux employeurs que j’ai rencontré, très peu sont compétents. C’est logique, on ne leur a jamais fait apprendre les attitudes à manifester. On se contente de dire et de faire faire. L’assemblage de l’un avec l’autre ne donne pas nécessairement le résultat escompté.
Ici, je ne parle pas de discipline et d’autorité. Je parle plutôt de qualités et d’adhésion. Quelles sont les qualités professionnelles à faire développer et comment faire en sorte que l’apprenant y adhère au point d’en teinter ses actions et son jugement? Il est là le défi de l’enseignant d’aujourd’hui. Malheureusement, il n’y a aucune formation sur le sujet. La formation universitaire a pour but la qualification professionnelle. Elle ignore le développement de la compétence professionnelle et encore plus le développement des savoir-être professionnels.
À titre d’information, je peux vous indiquer que j’ai retrouvé, chez certains de mes étudiants à l’université, des comportements nettement plus agressifs, dégradants et absents de toute éthique que chez mes adultes des années 70 et pourtant ils vont fort probablement devenir des enseignants, car encore aujourd’hui on se moque des compétences en enseignement dans la mesure où le prof connaît le métier …
La suite : Ils attentent que je leur dise quoi faire.
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