Il y a plusieurs études qui ont été réalisées traitant de l’efficacité des formations en entreprise. Ils convergent vers une même tendance. Elles indiquent que la formation qui se fait en entreprise a peu d’effet sur les pratiques de celles qui les suivent. Jean-François Roussel[1] explique bien la problématique dans son livre « Gérer la formation, viser le transfert ». Il cite des chercheurs qui constatent que 60 % à 90 % des apprentissages réalisés en formation ne sont pas transférés en milieu de travail. Ce constat m’amène à me questionner sur ce que l’on veut dire par apprentissage.
Ma préoccupation n’est pas tant que le transfert ne se fait pas, mais plutôt sur le point que la formation a-t-elle réellement fait accomplir des apprentissages? C’est pour cette raison, qu’à la suite de mes observations dans les milieux de formation dans les entreprises, mon attention porte surtout sur les apprentissages qui sont réalisés et la façon de les faire réaliser. S’il y a réellement eu apprentissage, il y aura transfert.
Un formateur n’est pas seulement un spécialiste animé par de bonnes intentions qui présente son PowerPoint que les participants lisent en même temps que lui. Cette pratique de formation est, ce que je nomme, la pratique du piquet. Le formateur pense, comme lorsqu’on veut planter un piquet, qu’à force de frapper dessus, il finit par rentrer. Ce n’est pas parce qu’on montre l’information, qu’on la fait lire et qu’on l’a dit que les participants apprennent. C’est lorsque les participants s’en servent et en découvrent le sens dans un contexte qu’ils vont apprendre.
L’approche ne doit pas être de transmettre suffisamment d’informations pour que le participant en retienne un certain nombre, mais plutôt de lui faire apprendre les informations dont il aura conscience de leur pertinence. Former moins tout en faisant apprendre plus, doit devenir un mantra pour le formateur.
[1] Roussel, J.-F. (2011). Gérer la formation : Viser le transfert, Québec, Guérin, éditeur ltée., Collection GU3M.
À suivre… « Ce qu’il faut apprendre »
NONGNI
Nov 23, 2016 @ 03:57:34
Bonjour Pr,
je suis un abonné de votre site, vos chroniques me sont toujours signalées dans mon mail.
J’ai de gros soucis à adapter vos chroniques au contexte de formation aux métiers comme ceux de l’enseignement. J’ai réalisé sauf si je me trompe qu’elles sont plus appliquées aux domaines techniques qu’aux métiers de relation à autrui. j’aimerai tant les adapter à la formation des directeurs d’écoles domaine dans lequel je mène des recherches.
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Henri Boudreault
Déc 19, 2016 @ 17:29:19
La formation à l’enseignement est une formation professionnelle. Je traite des interrelations avec les savoir-être. Les métiers d’infirmière, d’éducation spécialisée ou du domaine de la vente sont directement touchés par les interrelations. Justement, si les directions d’école abordaient leur fonction en tenant compte des savoir-être cela pourrait les aider grandement. Peu importe le métier ou la profession, selon Pastré, l’acte professionnel est soit orienté vers la machine, l’habileté du geste, les interrelations humaines ou un mélange d’un peu tout cela. Face à ce constat, il faut considérer la formation, même technique, comme englobée dans la compétence professionnelle qui exige la manifestation des savoir-être à des niveaux et des variétés divers. Vos questions pourraient aider à mieux cibler mes interventions à vos préoccupations.
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Pierre LABONTE
Nov 22, 2016 @ 18:24:21
Bonjour Henri,
je lis toujours avec grand plaisir tes chroniques.
Ici on parle de formation en entreprise. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles le transfert en milieu de travail ne s’opère pas ou peu (liste non exhaustive):
– Mauvais alignement des objectifs de formation avec le besoin réel;
– Est-ce que les candidat avait les pré-requis pour appréhender le niveau de difficulté de la formation?
– Est-ce que la formation elle-même était bien conçue? A-t-on uniquement évalué la satisfaction des participants en fin de formation (ce qui est le cas la majorité du temps) ou a-t-on réellement évalué les acquis de formation?
– Est-ce que la formation s’effectuait sur du matériel identique à celui qu’on retrouve sur le terrain? Lui a-t-on donné des pistes de généralisation pour que le transfert s’effectue?
– A-t-il eu la chance d’appliquer ce qu’il avait appris, et de l’appliquer rapidement, pas 3 mois après?
– Est-ce que son équipe de travail l’a soutenu à son retour de formation? Est-ce que son superviseur lui avait communiqué ses attentes pour le retour au travail?
– A-t-il trouvé la motivation nécessaire (directe ou indirecte) pour justifier l’effort au changement une fois revenu au travail?
– De plus, on compare souvent les résultats obtenus en fin de formation avec l’évaluation de la performance au travail et de là on tire des conclusions incongrues. Un n’est pas nécessairement garant de l’autre.
À titre de gestionnaire de département de formations en entreprise, je dis toujours que la formation (en classe, à distance, en atelier) est la partie la plus facile. Une fois de retour au travail, malgré les contraintes du milieu, parvenir à transformer un acquis de formation en augmentation de la performance, là est le plus grand exploit. Le défi suivant est le calcul du ROI.
Un livre à suggérer sur l’alignement de la formation:
The Six Disciplines of Breakthrough Learning: How to Turn Training and Development into Business Results , Apr 27 2015
by Roy V. H. Pollock (Author), Andy Jefferson (Author), Calhoun W. Wick (Author)
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De Broeck
Nov 22, 2016 @ 12:35:08
Effectivement Henri, non seulement il doit donner l’envie d’appliquer l’acquis, mais en plus il doit faire en sorte que les apprenants se sentent capable d’appliquer.
C’est l accompagnement au changement.
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