Réflexe - HB CRAIE 2019.001

Comme l’indique David A. Sousa dans son livre  » Un cerveau pour apprendre », le processus cérébral passe d’un processus réflexif (relevant de la réflexion),  à un processus  réflectif (de l’ordre du réflexe). Généralement lorsque l’on réalise une activité pour la première fois, nous avons tendance à nous appliquer et à tenir compte de tout ce qui peut nous fournir des informations pour la suite des événements. Par la suite, après avoir réalisé cette activité à plusieurs reprises, nous nous habituons et nous réalisons l’activité de façon automatique. La conduite automobile en est un bon exemple. Rappelez-vous la première fois que vous avez conduit une auto. Vous vous attardiez alors aux moindres détails. Regardez-vous aujourd’hui, après plusieurs années, ce sur quoi vous portez attention. La majeure partie de vos gestes sont des automatismes. Vous êtes passé d’un processus réflexif, à un processus réflectif.

Un autre facteur vient jouer également sur l’état réflexe et l’état réflexif, c’est la quantité de temps disponible pour réagir. Selon mes constats, moins nous avons de temps pour réagir à une situation, plus nous ferons appel à nos réflexes (réaction élémentaire automatique), plutôt qu’à notre réflexivité. Nous sommes alors plus enclins à exploiter ce que nous sommes plutôt que ce que nous savons. Nous faisons appel, dans ces circonstances, à notre mémoire épisodique et nous évacuons ce que possède notre mémoire sémantique.  Cela indique qu’en situation d’urgence nous exploitons ce que nous connaissons beaucoup plus que ce que nous savons. Savoir ne signifie pas connaître.

Je tenais à souligner ces points pour introduire une condition  importante pour faire développer le savoir-être professionnel. L’environnement influence le comportement et la variation du temps disponible permet de percevoir si le comportement manifesté par l’apprenant est intégré et compris. Lorsque nous mettons en place les conditions pour favoriser le développement d’une conduite professionnelle propre à une identité professionnelle, il faut faire en sorte de pouvoir jouer avec les circonstances d’un environnement professionnel et sur le temps. Moins nous avons de temps pour agir, plus nous passons d’un état réflexif à un état réflexe. Le comportement professionnel doit pouvoir devenir un réflexe chez l’apprenant.

L’analyse de mises en situation théoriques, pour permettre à l’apprenant de comprendre le savoir-être, est très peu performante. Il faut pouvoir placer l’apprenant dans un environnement de travail où des événements professionnels vont se dérouler à des rythmes et des vitesses différentes pour ainsi favoriser le passage de l’état réflexif à l’état réflexe tout en exploitant le passage du processus réflexif, au processus réflectif.

Le savoir-être ne doit pas être seulement acquis, il doit faire l’objet d’une appropriation. Cette appropriation ne peut se réaliser que dans un environnement de travail artificiel pour pouvoir  ainsi contrôler les événements et le temps, ce que ne peut offrir un environnement de travail réel. Ce qui m’amène à vous avertir que si vous pensez que c’est au moment où l’apprenant est en stage qu’il pourra être confronté aux savoir-être à manifester et ainsi l’apprendre, vous êtes dans l’erreur. La situation de travail réel fonctionne en temps réel. Placé dans cette situation, l’apprenant manifestera ce qu’il est et non ce que vous pensez qu’il aurait dû être avec ce que vous lui avez transmis, car il ne l’aura qu’acquis!